Protection complémentaire et ReImmigration : lorsque la protection juridique renforce la souveraineté
Dans le débat européen sur l’immigration, une confusion persistante fragilise à la fois l’État et le droit : celle qui consiste à assimiler toute forme de protection juridique à une installation durable et inconditionnelle sur le territoire. Cette confusion alimente la défiance de l’opinion publique, affaiblit la légitimité des institutions et rend politiquement instable toute politique migratoire.
La décision rendue le 30 décembre 2025 par le Tribunal ordinaire de Florence, dans l’affaire enregistrée sous le numéro R.G. 788/2024, apporte au contraire une clarification salutaire, fondée sur le droit et non sur l’idéologie. Le texte intégral de la décision est consultable à l’adresse suivante :
https://www.calameo.com/books/00807977541b94e1f7da1
Le jugement porte sur la « protection complémentaire », telle qu’elle est prévue par le droit italien à la lumière des obligations constitutionnelles et conventionnelles. Le Tribunal affirme avec netteté que cette protection ne constitue ni une amnistie humanitaire générale, ni un mécanisme déguisé de régularisation automatique. Il s’agit d’un instrument résiduel, strictement encadré, destiné à éviter qu’une mesure d’éloignement ne porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée.
Ce qui rend cette décision particulièrement intéressante pour le public français réside dans la méthode adoptée. Le juge refuse toute logique automatique. La simple présence sur le territoire, l’écoulement du temps ou les lenteurs procédurales ne suffisent pas à fonder un droit au séjour. La protection n’est envisagée que lorsque l’intéressé a démontré, par des éléments concrets et vérifiables, un enracinement réel dans la société d’accueil. L’intégration n’est pas présumée ; elle doit être établie. Le droit protège alors non pas une situation abstraite, mais une réalité humaine objectivement constituée.
Cette approche repose sur un raisonnement de proportionnalité, bien connu du droit européen et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Le Tribunal rappelle que la protection de la vie privée n’exclut pas l’exécution du droit des étrangers, mais impose un examen rigoureux des conséquences de l’éloignement. La protection complémentaire devient ainsi une exception justifiée, et non une règle systématique. L’État conserve sa capacité d’agir, tout en respectant les limites que lui impose l’État de droit.
C’est précisément sur ce point que la décision s’inscrit dans le paradigme de la ReImmigration. La ReImmigration ne nie pas la protection, pas plus qu’elle ne remet en cause les droits fondamentaux. Elle repose sur une exigence de cohérence : l’intégration est un processus réel, impliquant des devoirs, et non un simple statut administratif. Lorsque cette intégration est avérée, le droit protège. Lorsqu’elle ne l’est pas, la légitimité du retour vers le pays d’origine est restaurée. Un système qui protège sans discernement finit par perdre toute capacité d’éloignement. À l’inverse, un système qui protège de manière sélective renforce à la fois son humanité et son autorité.
La décision du Tribunal de Florence illustre ainsi une idée souvent absente du débat public : la protection juridique, lorsqu’elle est appliquée avec rigueur, renforce la souveraineté de l’État au lieu de l’affaiblir. En traçant clairement les limites de la protection complémentaire, le juge contribue à restaurer la crédibilité de la norme et la confiance dans l’institution judiciaire.
Dans un contexte français marqué par une tension croissante entre exigence de fermeté et impératifs de protection, cette décision offre une grille de lecture précieuse. Elle montre que le contrôle de l’immigration et le respect des droits fondamentaux ne sont pas des objectifs contradictoires, mais les deux faces d’un même ordre juridique équilibré. La protection complémentaire n’est pas un obstacle à la ReImmigration ; elle en est la condition de légitimité.
Avv. Fabio Loscerbo
Avocat – Barreau de Bologne
Lobbyiste inscrit au Registre de transparence de l’Union européenne n° 280782895721-36

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